"Il est temps de passer à autre chose" "Tu ne crois pas que tu as assez pleuré?" "Il n'aurait pas voulu que tu pleures autant." "Tu penses qu'elle serait heureuse de te voir dans cet état?" "Tu devrais aller de l'avant maintenant."
Des phrases anodines pour votre entourage qui souhaite que vous alliez mieux mais tellement blessantes pour vous qui vivez ce deuil. Chaque phrase dont le but est de vous "motiver" vous enfonce encore plus dans cette douleur et dans cette impression de ne plus être en accord avec le monde extérieur. Vous avez alors l'impression que quelque chose cloche chez vous, que vous êtes trop triste, que le chagrin prend trop de place, que ce n'est pas normal de ne pas arriver à passer à autre chose. Et vous vous mettez la pression parce que vous semblez trop lent(e) aux yeux de vos proches et de la société. Mais rassurez-vous, le processus de deuil est long...
Pourquoi le monde extérieur voudrait que ça "passe vite"?
Vous pouvez avoir l'impression que votre entourage, vos collègues ou votre famille voudraient que vous passiez à autre chose. D'ailleurs, ils ne vous demandent déjà plus comment vous allez au bout de quelques semaines. Comme si votre proche décédé et votre peine n'avaient jamais existé. Le deuil est un sujet tabou dans notre société. La plupart du temps, vos proches ne prennent pas de vos nouvelles parce qu'ils ne sauraient pas comment réagir si vous leur dites que ça ne va pas. Ils préfèrent occulter ce qui vous cause de la peine plutôt que de ressentir de l'impuissance à vous aider.
De plus, nous sommes dans une société de production, de consommation et de progrès. Lorsque vous êtes en deuil, vous n'avez droit qu'à quelques jours d'absence au travail. Si vous prolongez votre absence, vous devez fournir un certificat médical et vous êtes donc considéré(e) comme "malade" alors que le deuil n'est pas une maladie... L'OMS fixe un temps après lequel le deuil est réputé pathologique.
Vous avez donc des pressions extérieures, mêmes inconscientes qui vous poussent à traverser votre deuil le plus vite possible.
Et pourtant...
Le processus de deuil est quelque chose d'universel, c'est-à-dire que tout le monde le vit lors de la perte d'un être cher. Cependant, la façon de vivre ce processus est unique à chacun et dépend de nombreux facteurs (la brutalité de la mort, le contexte, l'intensité du lien, les ressources extérieures et le soutien de l'entourage, la religion...)
Il est important de prendre le temps de se reconstruire et de cicatriser la blessure du deuil. Un deuil douloureux n'est pas terminé au bout de 6 mois ou 1 an. Donnez-vous le temps de vivre votre deuil, n'essayez pas d'aller trop vite pour satisfaire l'extérieur car la cicatrice, c'est à l'intérieur de vous qu'elle est.
Vous n'êtes pas anormal si votre deuil dure plus que la "norme", même s'il dure plusieurs années. Plus vous plongerez dans la profondeur de votre deuil, dans votre ombre, et moins ce deuil risque de vous impacter par la suite.
Personnellement, je pense même qu'un deuil n'a pas de fin. Vous serez toujours endeuillé. Vous porterez toujours la cicatrice de votre deuil dans votre cœur. Vous penserez toujours à votre être cher, aux dates importantes et vous aurez plus de tristesse à certains moments. Il est important de réinvestir votre vie et de penser à des projets d'avenir. Cela veut dire que le processus touche à sa fin. Mais le deuil, lui, sera toujours là. En effet, le deuil est la douleur et cette douleur sera toujours là, même si, progressivement, elle deviendra plus tolérable et moins violente.
Le deuil n'a donc pas de durée précise. N'hésitez pas à vous faire accompagner par un thérapeute afin de vous assurer que vous êtes sur la voie de la cicatrisation et qu'il n'y ait pas de symptômes alarmants qui pourraient être le signe d'un deuil pathologique.
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